De musique avant toute chose
16 Septembre 2023
Dans les années 60, Sly and the family Stone oscille entre carton (Dance to the music) et échec commercial indigne (Life); pourtant, si les styles varient un peu, leur soul psychédélique, matinée d'une grande rasade de proto-funk est restée à peu près la même. Le groupe, toujours composé de Sly aux Claviers, son frère Freddie à la guitare, sa soeur Rose au chant et aux claviers, Cynthia Robinson à la trompette, Jerry Martini au sax, Larry Graham à la basse et Greg Errico à la batterie, reste un pourvoyeur solide de frisson rhythm 'n blues, chanté par plusieurs membres du groupe, dans une ambiance de ferveur inhabituelle même pour la soul music, un domaine où le plus souvent, l'individu est mis en valeur dans les collectifs. Ainsi on n'imagine pas James Brown partager le micro... Sly, si. Et chaque musicien a son mot à dire dans l'édifice.
Pour l'instant...
Derniers de leurs quatre premiers disques, Stand est sans doute le point le plus classique de la musique comme du message du groupe: funk irrésistible dansant et multicolore (Stand!, ou I want to take you higher), ambiance solaire et festive (Everyday people, un titre qui fera un très joli single, reflétant l'état d'esprit d'ouverture de Sly Stone, et You can make it if you try)... mais aussi l'album introduit des thèmes de plus en plus sombres: Sly devait lutter contre tous les racismes, contre ceux qui lui demandaient de virer ses musiciens blancs, comme contre ceux qui voulaient le cantonner à un rôle d'amuseur. Parfois maladroit, et marqué par la tentation de sons en adéquation avec leur époque (guitare saturée, wah-wah sur l'harmonica), Don't call me nigger, Whitey, affiche un refus d'exclure qui tranche sur la radicalisation de l'époque, mais révèle l'existence d'un racisme très répandu.
Si on se rappelle du grand cirque des concerts (avec des Dance to the music, qui encourageaient la participation du public, des Higher qui faisaient furieusement taper du pied, et l'impression d'une bacchanale sans limite), cet album prouve que Sly avait des choses à dire, et que le groupe était tout entier avec lui pour les dire... pour la dernière fois, puisque à partir de l'album suivant (There's a rot going on) la fête sera différente. Le groupe sera recentré autour d'un projet singulier, mais réduit à la vision d'un seul démiurge. Ce sera un classique, mais on peut préférer celui-ci, ne serait-ce que pour le funk contagieux et le groovequi le caractérise, comme d'habitude...
Stand! ou la dernière étape, donc, avant implosion dans un nuage de cocaïne...