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Spiral

De musique avant toute chose

Paul McCartney Flaming Pie (MPL/EMI, 1997)

Cinq années après Off the ground, et après la fin du projet Anthology avec les Beatles survivants, Paul McCartney a sorti cet album, qui ressort (demain 31 juillet 2020, pour être précis) en édition augmentée dans le cadre des rééditions personnelles... Et autant le dire tout de suite, il mérite le détour.

Paul McCartney a-t-il besoin en 1997 de prouver quoi que ce soit? Non, en réalité, et c'est probablement ce qui fait qu'enfin, après les égarements des années 80 (une suite d'albums de moins en moins inspirés, les uns à la suite des autres, par celui qui faisait de toute façon partie des aristocrates auxquels on ne demandait plus d'avoir du génie), puis la renaissance timide de la fin de la décennie, puis du début de la suivante (le retour sur scène, deux albums studios, deux "live" et un "unplugged", plus un projet rock 'n roll) qui montrait de beaux restes, McCartney avait aussi composé une oeuvre classique (Liverpool Oratorio) que, n'ayant pas entendue, je vais ici passer tout bonnement sous silence. C'est plus prudent, et si j'en crois les rumeurs, moins embarrassant... Flaming pie n'est pas le premier album solo de McCartney dans lequel celui-ci privilégie les enregistrements en solitaire: n'oublions pas, et il l'a prouvé dès les années 60 (Why don't we do it in the road) que Paul McCartney est le meilleur bassiste, batteur, guitariste et pianiste, et l'un des trois meilleurs chanteurs des Beatles, sans parler de son expérience personnelle de tout ce qu'on peut faire en studio. Mais les essais précédents (McCartney et McCartney II, respectivement en 1970 et 1980) étaient volontiers bâclés, présentant une musique qui trahissait en permanence le côté bricolo de ces enregistrements, comme si Paul avait du s'excuser de faire de la musique tout seul... En travaillant au studio comme on serait chez soi, avec des amis et collaborateurs choisis pour leurs compétences (et pour certains, pour leur capacité à suivre et compléter McCartney dans ses oeuvres solitaires), il inaugure une nouvelle étape de sa carrière, dans laquelle il va désormais faire principalement seul des disques qui sont aussi soignés et même parfois plus (Je pense ici à Chaos and creation in the backyard) que ce qu'il a fait auparavant. Exit donc le clinquant de Tug of war, bienvenue à Jeff Lynne, pape de la pop bricolo qui sonne large, et on en profite pour voir revenir de vieilles connaissances: George Martin, qui amène son expérience avec lui, Geoff Emerick ingénieur du son de l'époque des Beatles et surtout, surtout, un batteur exceptionnel sur deux chansons, Ringo Starr.

L'album accumule donc les chansons, 14 en tout, et tout en passant généreusement du coq à l'âne, donne l'impression de donner sans aucun effort un bouquet de chansons très réussies. Pas un gramme de remplissage dans cet album, mais il est vrai que la gestation a pris son temps, entre 1992 et l'enregistrement de Calico Skies, et les dernières séances de 1996. Au programme, donc, quelques ballades acoustiques (Calico Skies, Little willow), une exploration strictement orthodoxe du rock Anglais dont un titre en duo avec Steve Miller (The world tonight, If you wanna, Flaming pie, Used to be bad), des chansons pop aux refrains qui vous hantent (Young boy, Somedays) et deux chansons avec Ringo, dont la première a été improvisée en studio par les deux ex-Beatles: Really love you et Beautiful night. Il se dégage une atmosphère de simplicité une cohérence aussi bien stylistique qu'éditoriale, et une foi inébranlable en la musique, qui sont complétée par un constat: ces gens, Paul McCartney en tête, font magnifiquement ce qu'ils savent faire. C'est d'ailleurs la profession de foi du premier titre, The song we were singing. Pas étonnant que, même quand il disposera de nouveau d'un groupe de scène les années suivantes, le chanteur travaillera toujours à partir de titres sur lesquels il aura déjà enregistré l'essentiel, gardant le travail en groupe pour la scène.

Oui, "à nouveau", car le groupe de 1987-1992 a été congédié, pour des raisons qu'il ne nous appartient pas de connaître. D'une part, le projet Anthology allait accaparer Paul McCartney. Ensuite, Linda, on le sait maintenant, n'allait pas très bien: c'est même l'une des clés de cet album qui cache sous une apparente décontraction une authentique tristesse fataliste (Somedays, Great day, ou encore Heaven on a sunday vont clairement dans cette direction à la fois révélatrice et pudique, avec l'omniprésence du temps, désormais compté). Enfin, l'envie nostalgique de retourner aux fondements de son art, était sans doute la plus forte, comme le prouve l'ambiance finalement assez rétro de cet album, qui ironie profonde est sortie la même année que OK Computer. Ce dernier ayant tout dévasté sur son passage, voilà sans doute pourquoi on ne parlait plus beaucoup de Flaming pie. Raison de plus pour s'y remettre, avec cette belle édition au packaging très soigné, qui va jusqu'à étendre (sur l'édition 2CD) l'album avec un paquet de maquettes et surtout cinq morceaux absents de l'édition originale de l'album, et proposés pour certains en Face B. On y retrouve d'ailleurs Steve Miller, Ringo Starr et Jeff Lynne... L'évidence, pour moi, c'est que Flaming pie fait partie du cercle fermé des incontournables post-Beatles de Paul McCartney, avec (en ordre chronologique) Ram, Band on the run, Chaos and  creation in the backyard et Egypt Station.

 

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