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Spiral

De musique avant toute chose

The Hollies King Midas in reverse/Everything is sunshine (1967, EMI-Parlophone)

S'ils ne se sont jamais appelés Clarke, Hicks, Calvert, Elliott and Nash, les Hollies de Manchester n'en sont pas moins soumis à une lutte d'egos dans les années 60. Mais cette lutte n'est pas éloignée de celle qui se joue chez leurs cousins de Liverpool: elle se joue sur leurs disques.  ce titre, après avoir maintenu un équilibre fragile entre une soul blanche "ligne claire" (Allan Clarke), le rock'n roll plus traditionnel (Tony Hicks), et un folk-rock psychédélique et aventureux (Graham Nash), la balance va tout à coup pencher vers ce dernier: E.M.I. est sensible au fait que le rock expérimental se vend très bien en cette année de Sergent Pepper's!

Et les Hollies, à leur corps plus ou moins défendant, vont prendre le train en marche. Mais Clarke et Hicks l'ont toujours dit: le maître d'oeuvre des deux albums de l'année, Evolution et Butterfly, c'était Nash. 

Si aucun des deux LP n'offre de single, en revanche, le marché des 45 tours simples va être aussi affronté par le groupe, qui sort en septembre (soit en toute fin d'année 67) ce single hallucinant, qui remet en cause non seulement l'idée généralement répandue que les cinq musiciens soient des seconds couteaux, mais aussi l'impression que Graham Nash va enfin commencer à vivre en s'associant avec des musiciens américains qui vont toujours le remettre à sa place sur la pochette (......and Nash). Nash avait du génie, on le sait quand on écoute les albums des Hollies parus depuis 1964.

Face A: King Midas in Reverse (Clarke-Hicks-Nash)

Ca commence simplement, en même temps: deux guitares acoustiques, en arpèges, qui finissent par des accords, comme une vraie ballade folk. Une simple percussion, probablement des claquements de doigts, accompagne l'arrivée du chant de Graham Nash. Bien qu'il n'y ait qu'une seule ligne mélodique, il s'est doublé, et raconte son histoire lamentable de Roi Midas à l'envers, celui qui transforme l'or en poussière...

L'arrivée de la rythmique (avec une petite phrase bien piquée par Bernie Calvert) consacre aussi l'arrivée de plusieurs voix, ce qui n'a rien de formidable chez les Hollies. Sauf qu'ici, il s'agit pour l'instant de... Graham Nash. Il est tout seul, et on l'entend probablement sur quatre pistes, toutes sur le même canal (même si en single, le titre était uniquement en mono, le morceau est aujourd'hui disponible en stéréo).

Les autres voix arrivent pour le refrain, on remarque en particulier Allan Clarke (...Evidemment), et l'harmonie "classique" des Hollies donne un bon coup de fouet au morceau, avec l'appui particulièrement enthousiaste de Bobby Elliott qui s'amuse avec ses toms. Mais ce n'est pas la fin de la fête, pour autant: à 1:09, le deuxième couplet démarre sur un arrangement subtil et inattendu de violoncelles; les voix sont toujours là, démultipliées.

Elles changent de style le temps d'un pont situé à 1:27, l'accompagnement étant uniquement effectué par la basse et la batterie d'une part, et un ensemble de flûtes (des vraies, pas des flûtes de Mellotron!). Bien que les trois vocalistes soient toujours présents, la voix de Nash domine toujours clairement l'ensemble...A 1:48, l'orchestre emporte tout: flûtes contre vents, percussions en bataille, avec les voix en renforts qui chantent "all he touches turns to dust". C'est très impressionnant...

Après un dernier couplet qui plutôt que de résoudre l'histoire de ce "Roi Midas maudit" (King Midas with a curse), semble ouvrir un peu plus l'histoire de ses ennuis, le morceau se termine avec des volutes orchestrales qui répètent le refrain dans un fade out royal...

Face B: Everything is sunshine (Clarke-Hicks-Nash)

Avec ce titre, on pourrait toujours dire "ils avaient besoin d'une face B", mais je pense qu'il s'agit d'un morceau particulièrement travaillé... Par Nash, encore lui. D'ailleurs, comme avec la face A, si le titre est signé des trois leaders, ça ne fait aucun doute: c'est bien une création de Graham Nash de A jusqu'à Z. Il chante là encore, et est responsable d'absolument toutes les voix. Le chanteur a beau faire des efforts pour opposer dans les harmonies les différentes facettes de sa voix, on ne peut pas le rater.

Le son des Hollies est malgré tout très présent, notamment avec cette guitare: Tony Hicks, mais au son manifestement traité par Nash qui adorait faire joujou avec des effets de trémolo. La rythmique est dominée par la basse de Calvert. On entend aussi un piano désaccordé, qui nous rappelle qu'on est en 1967, et que tous les coups sont permis.

Donc, si la chanson est quand même dans une catégorie bien mineure par rapport à King Midas in reverse, elle se laisse écouter, et sa brièveté plus ses petits gimmicks sonores en font bien plus qu'un bouche-trou...

C'est un single spectaculaire, et ça confirme qu'en 1967, si officiellement Ron Richards était le producteur des Hollies, disons qu'il devait leur ouvrir les portes du studio de Abbey Road, et que pour le reste ils n'en faisaient qu'à leur tête... surtout Graham Nash; il est regrettable qu'une production aussi folle, mais également exubérante, n'ait pas rencontré le succès. A partir de là, le départ de Nash, tenu pour responsable de la mauvaise passe, n'était plus qu'une question de mois.

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